MAFILI (le livret)
Musiques et chants des Baali de la forêt équatoriale
Les Baali vivent dans la province Orientale de la République Démocratique du Congo. Leur territoire couvre une région importante de part et d’autre de l’axe routier Kisangani-Isiro où se trouvent quelques agglomérations Baali importantes, comme Bafwasende et Avakubi. La proximité de cette ligne de communication a permi aux Baali d’avoir des contacts fréquents et parfois importants (mais pas toujours faciles et heureux) avec le monde extérieur depuis l’arrivée des Européens dans leur région.
Les Baali, qu’on estime aujourd’hui au nombre de 30 000, appartiennent au groupe bantou, mais parlent une langue particulière lorsqu’on la compare aux autres langues de cet ensemble linguistique. Il s’agit d’un parler mixte, probablement issu du contact d’autres langues bantoues de la région et de langues parlées par des peuples appartenant au groupe soudanais central. Cette caractéristique montre que l’originalité de cette culture, qui était encore forte avant les tragiques événements des années 90, vient sans doute du fait de contacts nombreux et variés avec d’autres peuples.
Les Baali sont essentiellement des agriculteurs de forêt qui pratiquent la culture sur brûlis. Les principales cultures sont le manioc et les bananes ainsi que le maïs et le riz. Le palmier à huile joue aussi un rôle important dans l’économie des Baali. La pêche fournit aussi une partie importante des ressources alimentaires. La chasse est aussi pratiquée, mais son rôle est beaucoup moins important dans l’économie locale. La fin du vingtième siècle a vu, dans certaines régions du pays Baali, des modifications très importantes dans le mode de vie. Outre les changements introduits par le commerce sur l’axe routier Kisangani-Isiro, le rôle de plus en plus important joué par le commerce des minerais précieux, comme l’or, a eu un effet marquant sur la société Baali. L’influence des orpailleurs qui sillonnent le pays a eu un impact souvent désastreux sur les jeunes. La guerre civile qui a sévi à la fin des années 90 et ses nombreux aléas tragiques a aussi été un facteur déstructurant sur cette société et, à nouveau, principalement sur les jeunes.
Plusieurs traits ont rendu les Baali célèbres dans le passé. Il faut d’abord mentionner les aniota, ou hommes léopards, qui furent à l’origine de nombreux mythes et fantasmes, durant la colonisation. Cette association fermée avait une réputation terrifiante, parce qu’on lui attribuait de nombreuses morts rituelles. L’administration coloniale la taxa d’organisation criminelle alors que pour d’autres, elle était une association visant à résister aux changements dans la société traditionnelle. Quoi qu’il en soit, les aniota firent couler beaucoup d’encre et même si nul ne peut contester la réalité de crimes qu’on attribua aux hommes léopards, il ne fut jamais possible de connaître beaucoup de choses sur cette société qui faisait sans doute partie des nombreuses sociétés secrètes ou initiatiques des peuples de la région. Un autre caractère célèbre de la société Baali est l’initiation appelée mambela qui régit aussi toute la vie politique sociale et religieuse. Ce rite d’initiation qui semble avoir remplacé la circoncision, il y a longtemps, a lieu à des intervalles assez longs, au moins 2 ans et parfois plus. Officiellement supprimé par les autorités belges dans les années 1930, il est encore pratiqué de nos jours, dans des formes plus courtes que celles qui étaient pratiquées dans la tradition. Un dernier caractère important et moins connu du grand public est leur renommée de forgerons.
Musique et instruments
La musique qui est présentée sur ce CD est le résultat d’une mission destinée à préserver et à enregistrer le répertoire d’un instrument de musique qui semblait avoir disparu ou qui était sur le point de l’être. Il s’agit de la cithare sur planche qu’on appelle mafili en pays Baali. Cet instrument, très particulier, et à la sonorité riche et délicate est fait d’une planche rectangulaire de parasolier, qui est un bois léger et très résonant. Deux chevalets sont fixés aux extrémités et perpendiculairement au côté le plus long de la planche.
Ceux-ci permettent de tendre une vingtaine de cordes dont la hauteur musicale est définie par le placement de petits bâtonnets entre la corde et la planche. Le placement de ces bâtonnets défini ainsi deux parties sur chaque corde. Seule l’une d’entre elles est jouée, par un pincement de doigt. Le musicien place l’instrument sur ses genoux et divise les cordes en deux groupes. L’un qui est joué par la main gauche et l’autre par la main droite.

le CD: les titres
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